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Gabouillie
13 mars 2014

C'était le 22 février...

C'était le jour de la grande manifestation des opposants à l'aéroport N. D. des Landes... 60 000 personnes selon les organisateurs, 20 000 selon le préfet... 2000 casseurs selon les autorités, 200 maximum selon la journaliste d'itélé qui y était en direct... Seul chiffre non contesté, 520 tracteurs. Tout ça dans ma ville...

Forcément, j'y ai été... Parce que j'étais curieuse de voir ça et parce que ce projet d'aéroport est stupide (et coute très cher).

Comme de juste, mon bus m'a larguée loin de la manif', tous les trajets de ceux qui traversent le centre avaient été coupés ou modifiés... En plus, il pleuvait... En moins de temps qu'il en fallait pour le penser, l'atmosphère avait pris un air de malaise.

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(Clic sur les images pour voir + grand)

Par chance, le ciel s'est vite dégagé le temps marcher jusqu'au rassemblement... La pluie avait disparu, mais pas la sensation de malaise.

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Bon, j'ai mes habitudes de manif', pour rejoindre la tête du cortège, je coupe par les rues qui croisent le parcours... Mais cette fois... 

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Les forces de police avaient bloqué toute une partie du centre, les rues fermées par des barrières derrière lesquelles ils étaient retranchés.

Qu'à cela ne tienne, je décidai de rejoindre la queue du cortège... Là, ça semblait autorisé... En plus, c'était bien plus coloré et bien plus chaleureux.

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Et j'ai eu raison, c'était bien plus joyeux, il y avait même des Bellilois venus soutenir le mouvement. Dans tout ce monde, je suis tombée sur une de mes cousines, une saltimbanque maquilleuse artistique qui suit des cours d'agriculture bio, c'est dire s'il y avait du beau monde.

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C'était bien sympa, mais au bout d'un moment, il était évident que ça ne bougerait pas rapidement... il y avait beaucoup trop de monde... J'ai donc décidé de retourner sur mes pas et de reprendre le cours des 50 Otages pour rejoindre les tracteurs qui se trouvaient à l'autre bout. Mais voilà...

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... Les messieurs police empêchaient le passage... C'était très intéressant...

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Au début, j'ai cru qu'il avait un bug, plus tard, j'ai réalisé qu'il n'était probablement pas de Nantes et que, si ça se trouve, il ne savait même pas qu'il était place du Cirque... J'ai donc fait un tour... J'ai réussi à rejoindre l'autre côté, en passant par des "endroits autorisés" ou "pas interdits", avec le retour du sentiment de malaise qui tournait doucement à celui de menace...

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J'ai trouvé les tracteurs... Des tas de tracteurs... S'il se trouve un crétin pour dire que ce jour d'opposition à l'aéroport NDDL a été échec, c'est un menteur. Et j'ai retrouvé la bonne humeur des participants et sympathisants de la manif'.

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Bien sûr, il fallait que je prenne au moins une fois l'affiche de Tanxxx en photo, rien que parce que l'histoire de ce dessin, devenu symbole de la lutte, est extraordinaire...

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Et tant que j'y étais, rien ne m'empêchait de jouer la touriste en passant pas des rues calmes, enfin calmes, il y avait un hélicoptère au dessus qui s'est amusé tout l'après midi à mettre les nerfs de tous en pelote. J'ai donc traîné dans la rue Kervegan, riche d'un patrimoine historique nantais, qui aurait mérité qu'on la protège plutôt qu'en faire plus tard une scène de barricade pour la télévision.

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Bref, je jouais avec mon appareil, profitant du beau temps et de l'ambiance de kermesse qui régnait au sein de cette manif'...

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J'observais, amusée, ces centaines de personnes qui défilaient en respectant les pelouses de l'Île Feydeau... 

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Il y avait bien un endroit où la tension était plus palpable, là où les forces de police s'étaient retranchées pour empêcher l'accès au cours des 50 Otages (qui devait initialement être emprunté par la manifestation mais que le préfet avait interdit à la dernière minute. Le parcours étant ainsi réduit, le flux des manifestants s'est un peu dispersé, toujours dans la bonne humeur, pour réussir à rejoindre la destination finale du défilé, là où on faisait les discours).

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Et moi, je continuais à me régaler en faisant des photos de ma ville...

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Des centaines de tracteurs garés en double file sur les rails du tram, quai de la Fosse... (À noter qu'ils sont tous entrés dans la ville et en sont sortis sans aucun incident, pour tous ceux qui connaissent le bord... bazar qu'est la circulation nantaise, c'est exploit remarquable!)

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Sur le parking, en attendant les discours, c'était plutôt la fête... 

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Malgré tout, il y avait toujours ce malaise qui me turlupinait, une fumée au loin laissait imaginer que tout ne se passait pas parfaitement.

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On m'a raconté un peu plus tard que c'était un engin de chantier de "vinci" (la société qui a obtenu le contrat pour l'aéroport NDDL) qui avait incendié.

Mais, si la haine de "vinci", qui bétonne partout dans le monde, était sensible, ces événements lamentables semblaient totalement extérieurs à la manif'... 

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C'est ce qui était troublant, l'impression qu'il manquait quelque chose... J'ai suivi quelques manifestations, il y a toujours des représentants de l'ordre pour contrôler, diriger, protéger, comme ici, ou ... Et là, il n'y en avait pas, ni dans ni autour de la manif'. Ils étaient tous planqués derrière leurs barricades ou bloquant les rues qui menaient vers leur retranchement... Ils n'étaient pas là pour le bien de la ville, mais semblaient prêts à passer à l'attaque...

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C'est devenu une évidence quand je suis retournée vers les manifestants, en retrouvant l'entrée du cours des 50 Otages... J'étais partie par là avec l'idée de croiser peut être quelques amis et j'y ai trouvé quelques crétins jouaient à la guerre avec la police. 

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Je ne suis pas plus maligne que les autres, j'ai fait des photos, c'était spectaculaire, mais là encore, il semblait y avoir une frontière entre le petit jeu de la police avec leurs copains crétins et le déroulement paisible de la manifestation.

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C'était ça, c'était du spectacle... Et il était bien plus sûr d'être du côté des crétins que de celui de la police, les crétins ne visaient pas en direction de la manifestation. Il ne semblait pas très utile de s'attarder devant ce décor désolant, c'était plus rassurant de retourner au milieu de la foule des manifestants.

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J'ai bien réussi à y retrouver quelques amis, et la bonne humeur ambiante... Jusqu'à ce que...

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une grenade assourdissante (ou désencerclante)? Je ne sais pas mais ça m'a fait peur. Et tout de suite après...

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Les gaz lacrymogènes... Une découverte pour moi... Ça brûle le nez, les yeux, la bouche et la peau... Alors, on essaie de fuir, on essaie d'ouvrir les yeux pour voir où on met les pieds, on suit le mouvement de la foule... 

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Et forcément, on se couvre le le visage comme on peut, de là à croire que tous les manifestants étaient enfin démasqués et qu'on était tous des casseurs...

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Et puis, soudain, j'ai entendu une maman, qui tentait d'avancer à côté de moi, elle tentait de rassurer son enfant...

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Évidemment, on n'en revient pas que la police tire des saloperies sur des enfants et on se dit qu'il faut essayer d'aider cette maman à échapper à ce gaz... Mais quand on veut se repérer, on n'y arrive pas, ça fait trop mal aux yeux, on n'y voit rien entre deux clignements...

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Je n'ai pas réussi à voir cette maman et sa fille... J'ai pu me sortir de la fumée, pu respirer et pu arrêter de pleurer... J'ai croisé quelques connaissances, ce qui m'a un peu rassurée et ramenée sur terre, mais vraiment, (sans rire) je ne la sentais plus cette manif'. Si la police avait fait le choix de tirer sur des familles, des jeunes, des vieux, des enfants (parfois en poussette), c'est qu'ils avaient choisi la confrontation, ils n'allaient pas s'arrêter, ça ne pouvait que mal tourner.

Alors, en entendant les bruits des détonnations se rapprocher, j'ai décidé de rentrer chez moi... 

Arrivée au calme, j'ai jeté un œil aux infos, bien sûr, il n'y en avait que pour les casseurs qui avaient saccagé le centre de Nantes... Pas un mot pour les nombreux manifestants pacifistes, même pas pour les tracteurs... J'ai vu les dirigeants politiques faire leurs déclarations avant que ça soit fini... Ils savaient déjà qui étaient les coupables (les organisateurs de la manifestation).

Moi, j'ai vu la police laisser des casseurs faire ce qu'ils voulaient, les laisser détruire quelques endroits choisis, j'ai vu quelques branleurs du coin trop contents de pouvoir lancer des trucs sur les flics pour faire comme à la télé et trop cons pour se masquer le visage, j'ai vu une police organisée et préparée  à attaquer une manifestation dans l'unique but de permettre à quelques possesseurs de pouvoir de décrédibiliser une opposition à un projet stupide... 

J'ai eu du mal à m'endormir... Ce n'était pas la 1ère fois que j'avais à faire à des personnes détenant une autorité, censées être là pour veiller au bien être de leur prochain et qui finalement sont une menace pour tout le monde.

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Le lendemain, je suis retournée faire un petit tour dans le centre... Peut être pour me rassurer, pour voir si on pouvait toujours faire des photos de la ville...

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Je n'oublie pas que plusieurs personnes, venues simplement participer à une manifestation ont été blessées par des policiers. Certaines très gravement, deux ont perdu un œil à cause de tirs de flashball (peut être trois, toutes les victimes ne se sont pas publiquement déclarées), un enfant a été blessé au pied, des journalistes ont été directement et volontairement visés, un jeune garçon s'est fait matraquer en voulant secourir une dame âgée qui venait de se faire renverser puis piétiner par des policiers en armures, plus tard ils lui ont interdit l'accès à l'hôpital sous la menace de nouveaux coups... Je n'oublie pas que si ces forces de "l'ordre" on agi de la sorte, c'est qu'elles en avaient reçu l'ordre.

Au même moment, les Ukrainiens rendaient hommâge à leurs morts place Maïdan, à Kiev, ça devrait permettre de relativiser... Ou peut être mettre en garde...

 

 

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Commentaires
I
Enfin des nouvelles, merci pour ce témoignage (et cette longue note illustrée) Olli ! C'est bien différent de ce qui a été montré à la télé. Moi je me pose beaucoup de questions sur cet aéroport : est-il vraiment nécessaire ? J'ai cru voir que l'emprise devrait êrtre énorme, et avons-nous encore les moyens en ces périodes "d'économies" de lancer des chantiers pareils ? En même temps ce qui choque à Nantes quand on y reste un peu, c'est de voir les avions passer au-dessus du centre ville, à basse altitude. Cela c'est interdit à Paris et ça fait un peu peur. Alors quelle aurait pu être une bonne solution ? Les problèmes d'environnement ce n'est jamais simple (moi je ne regarde pas l'aspect économique, c'est une autre question et je ne suis pas compétente...)
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O
Vielen Dank, venant de toi, ça me fait forcément très plaisir... Du coup, j'ai bien fait d'y passer autant de temps, ha ha!...
Répondre
F
Oh waw, bel article. Touchant, et beau, sans ne parler que de ton trait bien évidemment. Merci !
Répondre
Gabouillie
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